Lundi 10h30
La porte de la bibliothèque s'entrouvrit, et la frimousse loufoque de Lÿli apparut. D'un coup d'œil rapide, elle balaya la salle du regard, avant d'entrer sur la pointe des pieds, et de refermer la porte avec le plus de délicatesse possible, comme si elle commettait un quelconque délit.
Elle poussa un profond soupir, les yeux mi-clos. Avec sa tête empreinte d'une expression sérieuse et concentrée qui lui était inhabituelle, on aurait pu croire qu'elle se préparait pour une mission ou une tâche qui déciderait la survie du monde. Soudain, ses lèvres se retroussèrent en un sourire malicieux et, elle se précipita vers la première étagère, les yeux pétillants à la vue de ce dédale de livres en tout genre. Voilà donc sa première entrée dans la grande bibliothèque de l'E3.
Lÿli battit joyeusement des mains, et huma le doux parfum de la pièce. Le parfum des secrets enterrés. Chaque livre renfermait une part de l''auteur. Un secret connu de lui seul, mais que, s'il perdurait, continuerait d'exister chaque jour. Une fourmilière de vie. Voilà le véritable trésor d'un bibliothèque. La pensée que ces million de vie reposaient dorénavant entre ses mains, l'excitait beaucoup plus qu'elle ne saurait le dire.
-Quelle délicieuse odeur que celle des livres oubliés, soupira-t-elle, un sourire bienheureux sur le visage.
Lÿli approuva ses dires par un hochement de tête, puis, retrouvant une expression plus sérieuse mais non moins enjouée, tira de sa poche une liste et un crayon, qu'elle s'empressa de coincer derrière son oreille gauche. Puis, consultant sa liste, elle se mit en quête des livres qui y étaient inscrits. Une fois la collecte terminée, Lÿli, croulant sous la pile de livre, se dirigea vers la table la plus proche et, avec le plus de délicatesse possible, y déposa le tout.
-Doucement. Voilà, c'est bien.
La jeune femme s'assit, et sortit de sa poche une paire de lunette ronde, sans verre, qu'elle posa immédiatement sur son nez. Puis, elle fouilla dans son sac et en tira un miroir, une balle de tennis et un pot de confiture à la myrtille vide. Lorsque toutes ses affaires furent en place, elle attrapa le livre le plus proche et entama une lecture approfondie, usant d'un art peu courant mais ô combien respectable : la lecture à l'envers, plus communément appelé dans le langage lÿlien : ''le miroir lisible''. Et, tout en jouant machinalement avec son collier en capsule de canette, elle se lança dans ''Les us et coutumes des mammifères volants'', s'extasiant par moment, et plaçant ses petits commentaires à d'autres. Complètement absorbée par sa lecture, elle n'entendit pas le bruit de pas qui s'approchait d'elle.
-Les oiseaux ne sont pas des miroirs irrespectueux, soupira-t-elle, ennuyée.