[S.13] Que faire ? [Pv. Rin et papi Lawa] [clos]

"Monsieur ?"

Elle est là, figée, dans le couloir, les bras le long du corps, un manteau anthracite encore sur le dos, la capuche abaissée, le tissu dégoulinant de pluie, les bottines trempées, tout comme le bas de sa jupe gris chiné. Les épis flamboyants de la petite Élémentaliste se font moins rebelles, l'humidité ambiante et la gravité accomplissent leur oeuvre, agglutinant les fines mèches par gros paquets pointus. La surprise a étréci ces pupilles turquoises habituellement inexpressives. Des jours qu'on ne l'avait vu. Où était-il ? Doucement elle approche de son pas mesuré, comme si de rien n'était, puis fait halte à distance alors que c'est un contact qu'elle voudrait. Pour se rassurer, pour se remplir un peu plus de la présence de l'elfe qui avait disparu de la circulation. Une courbette protocolaire, elle le fixe de ses grands yeux soucieux, détaille ce visage qu'elle n'a pas aperçu depuis des jours. En silence. Quelques longues secondes muettes que le clapotis de la pluie remplit. Enfin, la prise de parole.

"Si vous pensez rattraper les cours de la semaine dernière, il faudra que vous m'indiquiez les horaires que vous envisagez afin que j'ajuste les emplois du temps des élèves. Par contre, si vous y renoncez, je vais devoir le retenir sur votre paye." dit-elle timidement, presque à contre-coeur. [ Je suis horrible avec nos persos XD ]

Et de nouveau le silence alors que la pluie au dehors continue de tambouriner aux fenêtres. Rin baisse la tête, allant chercher les gouttelettes qui perlent le long de ses vêtements avant de s'écraser contre le sol de verre. L'intendante ne bouge pas mais ses mains se serrent et se serrent. Un instant ses lèvres hésitent avant de lâcher quelques mots tout juste soufflés.

"Vous aviez promis... J'étais inquiète..."

Abandonnée. Il l'a abandonnée alors qu'il lui avait déclaré le refuser de toutes ses forces sur les bords boueux du lac ce matin d'été. Et l'aveu de cet attachement, cette faiblesse, coûte à la jeune fille trop sérieuse autant qu'il la libère. Son coeur de rouvre, est-ce un bien ou un mal ? Si c'est un bien, pourquoi est-ce toujours si douloureux ? Pourquoi est-ce que ça ne la soulage pas davantage ? En même temps, si c'est un mal, comment expliquer que le retour de son collègue comble ce vide qu'elle a ressenti tout le long de la semaine qui vient de s'écouler ?

[ Si tu veux un ping pong de plus, je n'y vois pas d'inconvénient. Ça m'ennuie plus par rapport à Lawa à qui on avait dit juste deux posts n_n" ]


La fatigue alourdit chacun des gestes du professeur de stratégie d'habitude si agile et vif, détail qui n'échappe plus à la jeune fille maintenant. Tout ne semble que langueur et le moindre mouvement est une épreuve. Comme à la fin de leur affrontement. Qu'a-t-il bien pu lui arriver tout ce temps ? Bien sûr, il y a des manières plus douces de fêter le retour de quelqu'un mais Rin n'est qu'une fonction. Rien d'autre qu'une fonction. Et "ça", c'était tout ce qu'elle avait trouvé à dire maladroitement à son "collègue" qui ne manque pas de grimacer.
Quelques mots lapidaires ramèneront le regard céleste de l'Élémentaliste de Glace dans ceux du thériantropiste aux rubans vermeils. Elle cligne des yeux à chaque nouvelle parole, à la limite du sursaut, comme si elle se prenait un coup. Si le géant en noir se sent toujours seul même en compagnie de la petite rousse, c'est qu'elle ne représente plus rien pour lui ? Il n'a plus besoin d'elle près de lui. Elle est celle qui l'a blessé, ainsi, dans son esprit tourmenté, elle ne peut être également celle qui pansera ses plaies. Les sentiments timorés de Rin qui s'épanouissaient se rétractent tout à coup sous le choc des mots de l'elfe. À son tour il la repousse, à son tour elle reçoit la pique du rejet et le piège aux mille épines de se refermer sur son coeur qui était sur la voie de l'éclosion. La jeune fille aux cheveux humides comme sonnée aura pour toute réaction une expression abasourdie. Elle cherchera une solution à tout cela dans les pupilles claires de celui qu'elle ne peut appeler par son nom. Mais il... Il rompt le contact ? Il ne veut plus la voir. C'est terminé, elle ne fera plus le moindre pas vers Mendeleïev, elle ne sortira plus de son rôle désormais, ça fait trop mal. Cette sensation qu'on vous laboure la poitrine, cette douleur qui irradie jusqu'à la paralysie, ce vide hurlant en son sein, elle n'en veut plus. Tout à coup, elle n'existe plus, elle ne sert plus à rien, ni à personne alors qu'elle acceptait timidement d'être elle-même. Laisser parler ses émotions, ça n'apporte rien de bon, elles retournent à leur prison. Derrière leurs barreaux de neige, elles tempêtent qu'on les libère et parviennent à affleurer la rive de ses paupières de givre sous forme de larmes.

"Ne vous en faites pas inutilement pour votre demande de promotion." conclut-elle les sanglots dans la voix.

Elle incline les épaules, longuement, pour retarder autant que possible le moment où elle se relèvera et devra affronter le regard éther de son vis-à-vis. Puis doucement doucement elle repart. Comme elle est venue, alors qu'elle voudrait tant détaler et se réfugier dans son bureau, disparaître au plus vite de la vue de son collègue. Pas un regard, elle ne peut plus, se contentant de passer à côté de l'elfe en fixant le couloir droit devant. Nerveusement, son pouce vient chercher l'anneau d'argent à son index, raccrochant son être à un souvenir heureux, un sourire qu'elle espère depuis tant d'années, une promesse à laquelle elle veut continuer de croire.